Le déclic, quoi, quand, comment ?
Ce que certains appellent le " déclic " ou le " franc qui tombe " reste pour beaucoup un véritable mystère. Qu'est ce que c'est en réalité, comment le provoquer, quand se produira-t-il chez mon mari, ma femme, mon fils, ma fille, mon ami(e), mon/ma collègue de travail ?
Une première définition du déclic pourrait être : la prise de conscience que l'on a intérêt à arrêter sa consommation d'alcool.
Mais, cette définition laisse supposer avant tout, que l'on a accepté avoir des problèmes avec l'alcool et donc, par définition, éprouvé ces problèmes, c'est-à-dire les effets négatifs de l'abus d'alcool.
Ceci démontre bien que le déclic n'est sans doute pas un évènement ponctuel, mais bien plus un processus qui consiste en une évolution progressive depuis le déni total du problème jusque l'abstinence. Ce parcours, qui peut être long et qui comprendra souvent aussi des retours en arrière, est entretenu et animé par une succession d'incitants plus ou moins forts qui construisent et renforcent petit à petit la motivation du buveur à arrêter sa consommation.
Et voila bien le mot " magique " : La M O T I V A T I O N.
La construction de cette motivation est propre à chacun et dépend d'une multitude de facteurs, tant physiques que psychiques, liés à la personne, à son passé, son éducation, son affectivité et, aussi, aux relations qu'elle entretient avec son contexte de vie, familial, social et professionnel. Un certain nombre de ces facteurs vont être confrontés à l'obligation de changement. Ceci apparaîtra souvent au buveur, comme inconcevable, tant son besoin d'alcool est, pour lui, vital.
Il faut donc accompagner le buveur pour l'aider à faire naître et faire croître, en lui, cette motivation. Il faut, bien entendu, éviter d'agir à sa place. Contrairement à la tendance naturelle de chacun, Il convient de ne pas s'opposer au dilemme de sa confrontation aux changements nécessaires auxquels il devra procéder dans ses rapports à la boisson.
Un buveur, devenu dépendant, a besoin physiquement et psychologiquement d'alcool pour vivre.
Ainsi dans un premier temps, il faut amener le buveur à prendre conscience, de lui-même, des bénéfices certains de l'arrêt de la boisson par rapport aux effets délétères de l'alcool, et ce, malgré les effets psychotropes du produit qui paraissent, au malade, largement prédominant en rapport à ses effets toxiques. Cette étape lui permettra de passer de l'état de déni à la prise de conscience de l'intérêt de l'arrêt de la boisson.
Dans un second temps, il faudra l'aider à réfléchir et à définir lui-même les stratégies à mettre en place pour, d'abord, arrêter la boisson et, ensuite, maintenir l'abstinence par la mise en pratique de ces stratégies.
Tout ce processus a été bien décrit par deux psychologues canadiens " Prochaska et DiClemente " dans leur modèle des étapes du changement qui est schématisé dans la figure ci-dessous :
Partant de l'état de déni, un jour, dans un contexte sociétal ou personnel particulier, le buveur commencera à se poser des questions.
Il se dira, de temps en temps, que, peut-être, sa consommation pourrait bien être un peu excessive. A ce stade, ce questionnement reste du domaine de l'hypothèse ; il n'y a aucune conviction.
Un jour pourtant, sans arrêter pour autant, il admettra que sa consommation est effectivement excessive. Il recherchera, alors, de l'aide pour comprendre ce qui lui arrive. Tiraillé entre le besoin physique et psychologique d'alcool et le désir d'arrêter, il pèsera le pour et le contre de l'arrêt de la boisson.
Cette phase d'analyse le mènera graduellement, mais pas toujours, vers la mise en place des stratégies qui le conduiront, non sans peine, à l'abstinence. Il pourra alors se dire qu'il peut vivre " sans alcool ".
Pour atteindre le stade de la guérison, celui du " hors alcool ", il faudra qu'il se remette totalement en question et que lui et son entourage reprennent la place qui est la sienne dans la famille. Il devra aussi se réapproprier le temps qu'il passait à se procurer de l'alcool, à le boire et à " cuver ", en s'occupant utilement de manière aussi plaisante et valorisante que possible.
Ce processus évolutif n'est malheureusement pas à sens unique. Il arrive souvent qu'il y ait des retours en arrière, des accros, des pertes de confiance en ses capacités, des ré-alcoolisations, voire des rechutes qui le ramèneront à l'une des étapes antérieures.
----------------
----------------